Kampti et le pays Lobi

Le Pays Lobi qui couvre l’essentiel de la commune rurale de Kampti, se trouve à l’extrême sud du Burkina Faso, dans une zone comprise entre les frontières du Ghana et de la Côte d’Ivoire. Gaoua en est la capitale.

En effet, les populations qui peuplent Kampti se sont installées par vagues successives, en provenance du Ghana actuel. Les Thouni seraient les premiers occupants. Ensuite s’installèrent les lobi, beaucoup plus nombreux, puis les Birifor. Sur le territoire communal, Thouni et Birifor semblent avoir été assimilés au groupe majoritaire (lobi) : ils parlent tous la même langue, le lobiri, et pratiquent les mêmes cérémonies coutumières. Outre l’occupation d’un espace qu’ils ont longtemps préservé, ces peuples ont en commun une organisation sociale à part, assez loin des repères du reste de la société burkinabè.

Mais les Lobi ne sont pas les seuls habitants de Kampti. Après eux, sont arrivés les Dioula (peuple commerçant), à la fin du XIXe siècle. Enfin on note l’installation relativement récente des mossis et des peulh venus du nord du pays à la suite des sécheresses successives et de la pression foncière, pour bénéficier de terres plus fertiles et de pâturages.

 

Les communautés cohabitent pacifiquement. Des relations d’alliance existent entre elles. La parenté à plaisanterie (moal en lobiri) qui autorise, voire parfois oblige, des membres d'une même famille, de certains noms de famille et clans familiaux, de certaines ethnies ou des habitants de telle région, territoire et province (on parle alors d'alliance à plaisanterie) à se moquer ou s'insulter, et ce, sans conséquence, est l’un des moyens de désamorcer les tensions entre ethnies voisines ou entre clans familiaux.

 

 


La famille : la société lobi[1] est régie par un système basé sur le matriarcat. L’enfant porte le nom de sa mère. La famille est sacrée et le chef de famille, en est le premier responsable. Il jouit d’une forte autorité sur les membres de la famille. Le poids de la lignée du père est symbolisé par la cérémonie du « don de la houe ». Aucun de ses fils ne peut accéder à l’indépendance (constituer un ménage géographiquement séparé) sans son autorisation.

 

On distingue le ménage et la concession. Le ménage est constitué par un homme et son ou ses épouses et leurs enfants. La concession traditionnelle regroupe plusieurs ménages sous la responsabilité d’un chef de concession dénommé le « yir sob » en birifor et le «tchodarkoum » en lobiri. Les frères de la même lignée sont chef de concession.

 

L’héritage : dans la société lobi, le premier fils hérite des biens de son oncle maternel, excepté la terre. L’enfant hérite de son père la terre et les fétiches.

La femme hérite de tout, mais lorsqu’il s’agit de la terre, elle doit la rétrocéder en exploitation aux demandeurs éventuels. Elle garde toutefois le privilège de l’exploitation des arbres de cueillette (néré, karité). Pour ses besoins personnels, elle exploite les terres de son époux.

 

Les religions et croyances traditionnelles : Les Lobi sont animistes en majorité. Cependant la religion chrétienne a fait quelques adeptes catholiques ou protestants.

L’imaginaire collectif se nourrit de certaines croyances et observent certains interdits.

Les principaux rites coutumiers sont le « Djoro », le « Ditil », le « Tilka » : le premier est le plus grand rite coutumier lobi. C’est le rite coutumier le plus partagé. Il s’agit de l’initiation qui a lieu tous les sept ans et qui se déroule non loin du fleuve Mouhoun.

Le second marque l’entrée dans la saison agricole pour demander la protection et la bénédiction des dieux. Enfin le troisième rite est pour remercier les dieux et leur demander la bénédiction des récoltes. D’autres cérémonies coutumières concernent les funérailles. Les cérémonies funéraires revêtent une grande importance pour la population. Elles absorbent l’ensemble de la population pendant plusieurs jours, toutes activités cessantes.

 

L’organisation traditionnelle du pouvoir : Dans chaque village, il y a un chef de village et un chef de terre. La société lobi ne connaît pas de chef supérieur auquel les autres font allégeance : ce pouvoir n’est pas hiérarchisé, il n’est pas centralisé. Il arrive que le chef de village cumule les deux responsabilités (Kampti Bouti) ou qu’il soit un parent direct du chef de terre, son frère ou son neveu (Niamina). Tout se passe donc comme si le pouvoir traditionnel exerçait une mainmise sur ce représentant de l’administration qu’est le chef de village. En effet, la fonction de chef de village a été imposée par l’administration coloniale pour asseoir son autorité au détriment de l’organisation traditionnelle qui ne connaissait que le chef de terre, chargé de la gestion du foncier et des coutumes. Ce dernier exerce donc un rôle à caractère plutôt religieux, chaque clan ayant son domaine de propriété.

Quant au chef de village, son rôle consiste à régler les petits conflits entre les membres de la communauté.

Traditionnellement, le lobi jouit d’une indépendance d’esprit, il s’exprime librement.

Cette donnée apparaît comme un atout. Elle a été déterminante à l’époque de la colonisation, puisque ce territoire a été le dernier d’Afrique de l’ouest à passer sous domination coloniale.



[1] Pour approfondir sa connaissance de la culture Lobi, ne pas hésiter à visiter le musée de Gaoua.